Quand j’aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter les montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien (1 Corinthiens 13,2). Nos Fondateurs ont fait de la foi le fondement de notre vie nouvelle, conforme au Christ. Ils n’ont pas moins insisté sur l’espérance. Mais que seraient ces deux vertus théologales sans la charité? Saint Paul répond clairement: Si je n’ai pas la charité, je ne suis rien.*

De quelle charité saint Paul parle-t-il?

Lors des Estivales 2003, Mgr Marc Stenger a souligné l’ambiguïté actuelle des mots charité et amour: Ils sont piégés! Saint Paul utilise le mot grec agapê qui désigne l’amour du Père pour son Fils et du Fils pour son Père, qui n’est autre que l’Esprit Saint, baiser d’amour du Père et du Fils disent les Pères grecs. Il s’agit de l’amour qui unit et fait vivre la Trinité. Cet amour nous est donné dès le baptême: il ne demande qu’à croître et à imprégner toute notre existence. Cet amour nous permet de vivre le grand commandement: Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit… tu aimeras ton prochain comme toi-même (Matthieu 22,37-39).

Quelle belle vocation pour l’homme!

Aimer comme le Père et le Fils s’aiment, comme le Père et le Fils aiment l’humanité! Commandement impossible, me direz-vous. Cette réaction a toujours la même origine: nous pensons pouvoir réaliser par nous-mêmes, grâce à nos efforts et nos exercices, ce que Dieu veut réaliser en nous. Quand donc apprendrons-nous à nous laisser transformer par l’Esprit? Quand donc nous livrerons-nous à l’action sanctifiante de l’Esprit? À l’exemple de Marie qui est ce qu’elle est par grâce, c’est-à-dire par don de Dieu accueilli, dépossédée d’elle-même. Mais aussi grâce à Marie qui nous éduque à la docilité à l’Esprit. Combien de temps consacrons-nous, dans notre prière ou notre oraison, à ouvrir notre cœur, à l’exposer au soleil de l’Esprit, à nous laisser imprégner de l’amour venant de Dieu? Laissons de côté notre volonté de puissance!

Un être démuni d’amour

Il nous faut consentir à une expérience décapante, une expérience de pauvreté: nous ne savons pas aimer, nous ne pouvons pas aimer comme Dieu aime. Saint Ignace a fait cette expérience: être démuni d’amour! Expérience désespérante? Non, si elle nous conduit à la fontaine intarissable d’amour qu’est la Trinité. Permettre au Père, au Fils et à l’Esprit d’aimer en nous. Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés (Jean 13,34). Nos Fondateurs nous ont ouvert un chemin spirituel, celui de la conformité à Jésus-Christ. Dans l’Évangile de Jean, nous trouvons à maintes reprises ce mot comme: Jésus nous invite à vivre comme Lui. Saint Paul, lui, utilisera le mot avec le Christ. Des mots différents pour exprimer une même vocation: vivre comme et avec Jésus Fils de Dieu, devenu Fils de Marie pour le salut des hommes. Jésus est allé jusqu’au bout de l’amour, avec un cœur d’homme entièrement imprégné de l’Esprit, de l’amour divin. Et Marie, sa Mère, a participé pleinement à cet amour qui lui a permis d’entrer dans le projet du Père: Oui, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique… car Dieu n’a pas envoyé son Fils pour condamner le monde mais pour que le monde soit sauvé par lui (Jean 3,16.17), pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés (Jean 11,52). Avec Jésus, Marie est allée jusqu’au bout de l’amour.

Achever l’œuvre de renouveau

Les vertus de consommation, nous l’avons déjà dit, sont des vertus qui achèvent ou mènent à sa perfection la construction de l’Homme Nouveau, conforme au Christ. Foi, espérance et charité façonnent l’Homme à l’image et à la ressemblance de Dieu, dont l’image parfaite est Jésus. Et Marie a été la Femme recréée à l’image de son Fils par l’Esprit. En elle se reflètent toute la beauté et toute la nouveauté de la re-création. Sa mission est de nous entraîner sur cette voie: confions-nous à elle sans réticence. Tout cela est le miracle de l’Amour!