Cheminer…

Un mot à la mode? Non. Dieu lui-même, dans l’Ancien Testa­ment, propose à l’homme le choix entre deux «voies», celle de la vie et celle de la mort. Le Psaume premier en est un excellent résumé. Jésus lui-même se présente comme le Chemin  (Jean 14,6). Les premiers chrétiens sont appelés les adeptes de la Voie (Actes des apôtres 9,2). L’histoire de la spiritualité est jalonnée d’auteurs qui présentent la vie spirituelle comme un chemin: Guigues II le Chartreux écrit L’Echelle des moines, Jean de la Croix invite à gravir la Montée du Carmel, Thérèse d’Avila parcourt les demeures du Château intérieur, Thérèse de Lisieux invente la petite voie… et Chaminade parle de méthode, dont l’étymologie est précisément faire route avec ou à la suite de quelqu’un, selon des étapes étalées dans le temps; suivre une méthode, c’est utiliser des moyens, s’accoutumer à des manières de faire quelque chose en compagnie de quelqu’un. Comme, par exemple, l’apprenti ébéniste qui s’initie à manier des outils, à travailler le bois selon des lois, des gestes bien précis, en compagnie d’un « patron ». Nous pouvons également creuser la piste de la pédagogie.

… en donnant sens…

Ne dit-on pas qu’à l’origine de bien des difficultés de la société actuelle, il y a la perte du sens? Que veut donc dire « donner sens à sa vie, à sa conduite? » – donner une « signification »: une conduite personnelle ou collective « dit » quelque chose à l’entourage; – donner une « direction »: une vie, une conduite a une visée; vers où, vers quoi, vers qui conduit-elle? – intégrer les cinq « sens », c’est-à-dire les facultés du corps: le corps personnel et les corps institutionnels sont concernés par cette conduite.

… en fixant un but exaltant, une direction

Toute vie spirituelle doit se fixer un but et prendre les moyens adéquats pour l’atteindre. Nos Fondateurs eux-mêmes ont été dynamisés, enthousiasmés par le but qu’ils proposent à leurs disciples: vivre en union avec le Christ, en conformité avec lui, être d’autres Christ, et non seulement des imitateurs. Le père Chaminade se réfère souvent à ce texte de saint Paul: Ceux que d’avance il a connus, il les a aussi prédestinés à être conformes à l’image de son Fils (Romains 8,29). Et il commente: La perfection étant dans la conformité avec Notre Seigneur Jésus-Christ sous la protection et sollicitude maternelle de Marie, il faudra faire connaître de plus en plus et le motif pour lequel Jésus-Christ est venu en ce monde, comment il est la voie, la vérité et la vie, comment Jésus-Christ nous communique son esprit, comment l’Esprit de Jésus-Christ nous fait vivre de la vie de Jésus-Christ et nous conforme entièrement à notre divin modèle (Écrits de Direction II, n° 404). Rencontre personnelle, vivifiante et vitale avec Jésus-Christ; vie de l’Homme nouveau. Notre vie ne peut être qualifiée de « chrétienne » que lorsque nous vivons de la vie même du Christ: pensées, paroles, actions, relations sont vécues en Christ, selon son esprit qui est l’Esprit Saint. N’est-ce pas là vivre cette qualité si touchante d’Époux de l’Église et de nos âmes que Jésus-Christ daigne exercer continuellement envers son Corps mystique et envers chacun de ses membres? (Écrits de Direction II, n° 147, 187). Ce but peut aussi se nommer sainteté, « perfection de la charité ». Nos Fondateurs n’ont cessé d’exhorter tous ceux qu’ils rencontraient à la sainteté, bien convaincus que l’évangélisation et la rechristianisation ne pouvaient se réaliser sans le témoignage d’un peuple de saints. Jean Paul II ne demande pas autre chose lorsqu’il appelle à mettre en œuvre une pastorale de la sainteté. Voilà à quoi le Père nous appelle: entrer dans une relation filiale en la personne de Jésus, son Fils bien-aimé, sous la mouvance de l’Esprit qui les unit. Soyons heureux de cette invitation! Remercions pour cette extraordinaire vocation! Accueillons, comme Marie, cette « invitation au voyage »! Sans peur, en nous appuyant sur Dieu lui-même. Notre but est clair: Vivre en conformité avec Jésus-Christ, Fils de Dieu devenu fils de Marie, pour le salut des hommes.