Obéissance, voilà un mot et surtout une réalité qui suscitent des réactions plutôt négatives chez nos enfants! Et ne sommes-nous pas tous restés un peu des enfants en ce domaine? Et pourtant l’itinéraire spirituel proposé par le bienheureux Chaminade propose l’obéissance comme une préparation, c’est-à-dire un des premiers pas dans la vie spirituelle. Que ce soit pour devenir conformes au Christ ou pour remplir notre mission dans le monde, Chaminade nous apprend à être dociles ou souples entre les mains de l’Esprit. C’est l’apprentissage de la remise complète de soi entre les mains de l’Esprit, notre Maître. Voyez comment les apôtres se laissent conduire dans le livre des Actes. Dans l’apprentissage, on commence par des choses simples. Pour acquérir cette souplesse, nous avons besoin de médiations, d’une direction, d’un accompagnement.
Qu’est-ce qu’obéir?
Dans l’Écriture, ce mot est synonyme d’écouter la voix du Seigneur. Saint Paul (Romains 1 à 8) et les Pères de l’Église montrent que tout le mal était entré dans le monde par suite de la désobéissance. Au lieu d’écouter Dieu, l’homme s’est mis à l’écoute du serpent et de lui-même. Cette désobéissance a été rachetée par l’obéissance d’un couple nouveau, entièrement à l’écoute de la voix du Père: Jésus et Marie. L’humanité nouvelle, née du baptême, est celle qui écoute la voix du Seigneur, qui met sa foi en sa Parole de Vérité. Une des caractéristiques du Peuple nouveau est l’obéissance de la foi, obéissance qui fait confiance en Celui qui parle, et dont la réponse est toute imprégnée d’amour. Obéir est un acte de liberté: librement, j’accepte de suivre la voie tracée par le Seigneur.
Accepter que Dieu parle par des médiations
Nous savons que Dieu parle par des hommes, des événements, des songes, des signes. Depuis plusieurs années déjà, on constate une crise des médiations, à la suite du désir d’autonomie, des revendications de liberté de l’homme. Non que ces désirs soient mauvais, puisque Dieu a voulu des êtres libres, mais que le « péché originel » nous habite tous: nous voulons être libres, mais… sans Dieu. Or, le père Chaminade nous assure que le chemin de la sainteté passe par l’acceptation de médiations. Lesquelles? – D’abord celle de Jésus, l’unique Médiateur entre Dieu et les hommes. Jésus, Verbe éternel, s’exprime en un langage d’homme, paroles et actes. Les Évangiles, comme les auteurs du Nouveau Testament, sont les médiations, indissociables du premier Testament, de cette Parole de Vie. – Ensuite celle de l’Église, Corps du Christ. Les pasteurs, donnés par le Christ, continuent sa mission d’enseignement. Ce point fait souvent difficulté aujourd’hui. Au lieu de nous rebiffer, n’aurions-nous pas à nous demander: et si Dieu voulait me dire quelque chose, et quoi? Les sacrements ne vont pas davantage de soi: ils sont pourtant des signes, des médiations de l’action de Dieu à vivre dans la foi. Les membres de l’Église, nos frères et sœurs, sont aussi les médiateurs de Dieu: avec eux, nous cherchons et nous discernons. Nos enfants ne nous adressent-ils pas parfois des paroles de Dieu? Les parents me l’ont souvent fait remarquer et moi-même j’en ai fait l’expérience en maintes occasions. Dans le couple, l’obéissance de l’un à l’autre est un réel chemin de sainteté et d’écoute de Dieu, j’en ai de très beaux exemples. – Celle des hommes, de la vie du monde, des événements. La lecture des livres du Premier Testament est instructive à ce sujet: les auteurs n’ont-ils pas « relu » les événements historiques, sociaux, culturels, religieux à la lumière de la foi pour y discerner les actions de Dieu, ses appels, ses « colères », ses bienfaits, etc.? Jésus lui-même s’appuie sur les événements de la vie quotidienne pour enseigner. Saint Jean XXIII n’a-t-il pas appelé l’Église à savoir lire les « signes des temps »? Si nos Fondateurs n’avaient pas « relu » l’histoire de leur temps, auraient-ils entrepris avec audace et esprit de foi ce qui fait le fondement de notre charisme? Plutôt que de gémir sur les malheurs des temps, n’aurions-nous pas avantage à chercher passionnément ce que Dieu veut nous dire? Peut-être trouverions-nous aussi de nouveaux chemins pour la mission: avec les apôtres et les premiers chrétiens, nous pourrions redire l’Esprit Saint nous a poussés… nous a envoyés… nous a interdit de…
Des étapes dans l’obéissance
– La première est la pure soumission: le motif de cette obéissance est la crainte, l’obéissance d’esclave. Or, nous ne sommes plus esclaves, mais Fils, nous dit saint Paul. – L’obéissance de pure et franche volonté: s’unir aux projets de Celui (ou celui/celle) qui commande. Deux volontés s’unissent pour réaliser le même projet. Ce que Dieu veut, je le veux aussi, disait Mozart. – L’obéissance de volonté et de jugement: on offre au Seigneur le bien le plus précieux que nous ayons reçu de Lui, notre liberté. On découvre alors que plus on obéit à Dieu et à son Esprit – quelle que soit la médiation utilisée – plus on devient libre intérieurement, mais aussi vis-à-vis des autres et des événements. Ainsi vécurent Jésus et Marie. * * * Ces quelques réflexions sont une première approche pour nous sensibiliser à cette « vertu d’obéissance » qui vient à la suite du silence et du recueillement. Dans le prochain article, nous verrons comment cultiver pratiquement cette obéissance.