Arracher l’ivraie
«A leur suite et comme eux, comme Jésus au désert, nous sommes invités à cultiver notre jardin intérieur, a souligné Geneviève de Simone-Cornet. Citant Sœur Catherine Aubin, dominicaine, dans son dernier ouvrage, «Sept maladies spirituelles. Entrer dans le dynamisme des mouvements intérieurs», elle a relevé que le carême est un temps «pour apprendre à soigner, tailler ou arracher les mauvaises herbes qui empêcheraient les bonnes graines de pousser et de croître».
«Entrer en carême, c’est vouloir faire un pas de plus dans la vie spirituelle, avancer ensemble, en Eglise, vers le Christ car, disait le Père Chaminade, ‘l’isolement est une faute pour un chrétien’.» Tous nous sommes appelés à devenir des saints: «La sainteté se construit jour après jour par de petits gestes et nous sommes toujours en chemin» vers la rencontre avec Dieu. Pour cela, il nous faut supprimer les obstacles à notre relation avec lui; et le carême est le temps qui nous est donné pour y travailler. Et nous ne sommes pas seuls sur ce chemin, nous avons des guides spirituels: Marie, Joseph, Guillaume-Joseph, d’Adèle et de Faustino. «Ils nous indiquent un chemin de liberté et de joie.»
Se libérer des idoles
Comme eux, a poursuivi la conférencière, «nous sommes appelés à vivre de la foi, aliment de l’esprit et aliment du cœur. Sans elle, nous nous fabriquons un Dieu à notre image. Or la foi, c’est se laisser déranger, bousculer, comme Abraham, à qui Dieu dit: ‘Marche en ma présence’. Marche, va: je serai avec toi. Mais d’abord mets-toi en route». Pour le Père Chaminade, la foi c’est deux choses: un contenu une expérience, l’acte de croire. Et «le contenu doit alimenter l’expérience. La présentation du dogme doit se mettre au service de l’acte de croire».
Mais qu’est-ce que croire? C’est prendre de la distance par rapport à nos idoles pour entrer dans l’alliance avec Dieu, marcher sur un chemin de liberté et de vérité. Et quelles sont nos idoles spirituelles? Par exemple, réduirel’Ecriture à un code de morale;rechercher un dieu intimiste qui nous dispense de vivre, d’oser, d’aller vers les autres;prétendre détenir la vérité;porter un jugement sur les hommes, partagés en bons et méchants, justes et pécheurs; craindre un Dieu exigeant qui nous juge et nous culpabilise.
Croire, c’est faire confiance. Vivre de la foi du cœur si chère au Père Chaminade: lâcher notre volonté de tout comprendre avec notre tête pour entrer dans une dynamique de relation. Rude combat! Mais croire, pour nous marianistes, c’est le fondement de la vie spirituelle. Nos fondateurs nous exhortent à être «forts dans la foi».
Pour cela, ils nous ont tracé un chemin, les buts de la Famille marianiste: tendre à sa propre sanctification, rechercher une intimité avec Dieu, un progrès spirituel dans la relation avec lui; se préserver du mal en agissant selon l’esprit pour grandir dans la liberté; travailler au salut des autres, agir dans le monde, être missionnaire.
Une attitude d’écoute
«Comment fortifier notre foi? Par la prière.» Elle nous décentre pour nous faire entrer en relation avec Dieu dans une attitude d’écoute: nous écoutons la Parole pour découvrir Dieu qui se révèle à travers elle. Elle nous fait découvrir Dieu, nous découvrir nous-mêmes dans un regard qui nous permet de reconnaître nos limites et poser sur les situations et les personnes le regard même de Dieu – voir, ainsi, que certaines d’entre elles ont été Parole de Dieu pour nous.
«Une foi solide nourrie par la prière: c’est ainsi que nous devenons de véritables fils et filles de Marie, avec l’Esprit Saint, formés par elle pour devenir conformes à son Fils et le donner au monde», a souligné Geneviève de Simone-Cornet en conclusion. Le PowerPoint qui a suivi a été l’occasion d’une discussion entre les participants et d’une actualisation de la spiritualité marianiste.
Mener le combat spirituel
L’eucharistie, célébrée par le Père Casimir Tchéou, a ensuite rassemblé les participants à la chapelle. Dans son homélie, le prêtre, commentant l’évangile du jour, les tentations de Jésus au désert, a rappelé que «le problème n’est pas de savoir si le diable existe ou non, mais de discerner son influence ou de la refuser». Dans son exhortation apostolique «La joie de l’Evangile», le pape François a écrit qu’«il nous empoisonne par la haine, par la tristesse, par l’envie, par les vices. Et ainsi, alors que nous baissons la garde, il en profite pour détruire nos familles et nos communautés, car il rôde comme un lion rugissant cherchant qui dévorer».
Ainsi, poursuit le pape, «la vie chrétienne est un combat permanent. Il faut de la force et du courage pour résister aux tentations du diable et annoncer l’Evangile. Cette lutte est très belle, car elle nous permet de célébrer chaque fois le Seigneur vainqueur dans notre vie». C’est un combat à mener avec vigilance et discernement pour éviter deux pièges du démon, selon le Père Chaminade: «Tantôt il nous offre des objets qui nous effraient ou qui nous dégoûtent; tantôt il nous présente des objets flatteurs et agréables. Il se sert du premier pour éloigner la vertu et du second pour attirer dans le vice». Ce combat spirituel «consiste dans les défenses que nous faisons contre les tentations de toutes espèces et les attaques que nous livrons contre nos passions».
L’oubli de Dieu
Evoquant les tentations de Jésus au désert, le Père Casimir a souligné qu’«elles renvoient aux nôtres». La première, celle des pierres changées en pain, consiste à «se concentrer sur le matériel, les besoins primaires, le bien-être et d’oublier Dieu». La deuxième, celle de l’idolâtrie, nous rappelle qu’«aujourd’hui ce sont des cœurs et des vies entières que l’on offre aux divinités qui s’appellent plaisir à outrance, argent, pouvoir, individualisme, égoïsme… en oubliant que notre cœur est fait pour Dieu». La troisième est le fait de douter «de la présence et de la puissance de Dieu dans nos difficultés» et dans notre vie quotidienne. Enfin, «Dieu nous relève: nous sommes des pécheurs, mais des pécheurs pardonnés. Il nous fait participer à sa victoire sur le mal».
La traditionnelle raclette a permis à chacun de vivre un moment de convivialité apprécié. L’après-midi, le Père Casimir a donné le sacrement des malades à quatorze personnes dans une célébration empreinte d’émotion et de reconnaissance.
Geneviève de Simone-Cornet